Urgence climatique globale et impacts en Afrique (subsaharienne) : quelles sont les priorités de ce continent ?

Cette contribution s’inscrit dans la continuité de plusieurs textes en rapport à l’urgence climatique que nous avons déjà publiés. Il s’agit de montrer que le réchauffement climatique est global. La recherche des solutions et l’implication de tous les pays sont, de ce fait, un devoir moral et vital.  Le monde étant devenu un village planétaire, il semble difficile de se soustraire à cette réalité de plus en plus pressante. Bien que solidaires aux conclusions des Accords de Paris ou COP 21 en 2015, l’Afrique doit néanmoins définir et hiérarchiser ses priorités, sans toutefois marginaliser le problème du réchauffement climatique, dont les effets pourraient impacter ses populations et ses écosystèmes de manière irréversible.

Réchauffement climatique global : devoir moral et engagements communs

Les différents diagnostics établis par le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC) et des scientifiques indépendants montrent que la surchauffe climatique globale touche toute la planète Terre, voire au-delà. L’évidence d’une planète désormais déstabilisée et déréglée par les gaz à effet de serre d’origine anthropique semble actée. Les consciences humaines et leur subconscient sont ainsi formatés. L’homme contemporain a définitivement imprimé en lui cette idée, vraisemblablement irréfutable. À ce qui paraît, il devient difficile, sinon plus politiquement correct de penser autrement. Il y a comme une souscription, voulue ou pas, à une sorte de pensée unique qu’il faudra absolument valider. Le cas échéant, la conviction collective, notamment celle des grands décideurs planétaires, peut susciter de plus en plus des réprobations à même d’entraîner des sanctions aux voix divergentes ou discordantes.

Toutefois, l’idée d’une Afrique plus menacée par des aléas climatiques comparativement à d’autres parties du globe est à la fois inquiétante et préoccupante, eu égard aux difficultés multiformes que vit ce continent. Or la menace touche tous les citoyens de la planète Terre. Il est de ce fait urgent d’agir ensemble. Même si des menaces sectorielles et spécifiques sont annoncées pour le continent africain, il a, bon gré mal gré, le devoir moral de contribuer à la recherche des alternatives durables au problème du réchauffement climatique. Car, la menace qui en résulte relève d’une attitude incivique de tous les hommes, peu importe leur lieu géographique. L’incivisme écologique n’est pas une spécificité occidentale, asiatique américaine ou africaine. Elle est le fait de l’inventivité humaine et de son agir impactant.

Quoi qu’il en soit, l’idée d’une nécessité d’agir devra désormais être inscrite dans les consciences individuelle et collective. La Conférence de Paris ou COP 21 l’avait ainsi acté par un accord contraignant signé par 196 parties, du jamais vu ! De ce fait, l’Afrique est impliquée malgré tout, elle doit, pour cela, valider les conclusions des débats qui ont eu lieu, ne serait-ce qu’en guise de solidaire morale.

L’Afrique dans un village planétaire

Nous l’avons souligné, le réchauffement climatique est d’abord global, puis sectoriel ou local. L’Afrique n’est pas une entité isolée au sein de la planète. Au contraire, elle est un acteur important, non pas par rapport au niveau d’émissions des gaz à effets de serre impactants pour la planète, mais dans le sens où elle est désignée, injustement ou non, comme faisant partie des secteurs les plus impactés par « les effets rares et irréversibles » du dérèglement climatique.

Elle doit nécessairement s’impliquer à la crise climatique, parce qu’elle fait entièrement partie du problème. Le cinquième (5e) rapport du GIEC l’a dit, l’Afrique fait partie des zones les plus touchées par le réchauffement climatique global. Elle est, de ce fait, un acteur important et doit contribuer à la recherche des solutions relatives à la crise climatique. Car, elle vit dans système global et mondialisé.

À l’évidence, l’homme vit désormais dans une économie mondialisée. Pour preuve, l’avènement des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) a facilité le franchissement des frontières entre États. Le monde est ainsi devenu un « village planétaire », pour paraphraser Mac Luhan. Cette réalité incontournable montre que l’Afrique, sinon l’humanité, est entrée de ce fait dans le siècle du virtuel et de la vitesse. Ce siècle de la vitesse a accéléré les habitudes humaines, ainsi que leur manière de vivre et de consommer. En d’autres termes, l’information, les marchandises et les autres produits commerciaux sont devenus, en principe, faciles d’accès, quel que soit le milieu géographique dans lequel l’on se situe. Il en va de même pour les préoccupations englobantes telles que le réchauffement climatique et le développement durable. En somme, la circulation des biens et des services, ainsi que les préoccupations d’ordre mondial comme les pandémies et les préoccupations climatiques, ont un caractère englobant et international. Cet état de fait brise les barrières entre États et entre continents. L’accès aux frontières devient peu à peu accessible à tous, aussi bien virtuellement que physiquement, le même principe s’applique naturellement au contexte climatique.

 L’Afrique solidaire aux conclusions de la COP 21

Il ressort que l’Afrique est l’un des continents qui comptent le plus grand nombre de pays pauvres. Cela revient à dire que quelques pays de cette partie du monde souffrent du sous-développement. Or, le problème du sous-développement implique un grave déficit aussi bien en termes d’infrastructures que sur le plan alimentaire. De ce fait, l’Afrique ne peut malheureusement se soustraire aux contraintes de certains organismes tels que le Fonds monétaire international (FMI), L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ou autres entités de même type qui, très souvent, imposent à tous les États membres de s’arrimer aux standards internationaux d’organisation des rapports économiques, politiques, sociaux et aujourd’hui environnementaux.

Dans ces conditions, l’Afrique doit nécessairement être solidarise à d’autres pays du globe, pour espérer résoudre des problèmes qui minent certains de ses États constitutifs, surtout ceux situés au sud du Sahara qui seraient plus exposés aux affres du réchauffement du climat, à cause de leurs positions géographiques, entre autres.

Ainsi, sans en être une priorité urgente absolue, la question de la crise climatique ferait, certainement, partie des problèmes importants à régler, de sorte qu’elle ne puisse accentuer les maux déjà existants qui, en une sorte de cercle vicieux, ont pour effet de retarder son développement, souhaitablement durable. Si la planète se dérègle par la faute des hommes ou qu’il soit, c’est aux humains de trouver des solutions d’ensemble ou des perspectives authentiquement adaptatives et réparatrices, face à la vulnérabilité de certains États et aux souffrances de certaines populations.

 

Implication climatique de l’Afrique : formation et hiérarchisation des priorités

C’est évident, l’Afrique doit s’impliquer dans la recherche des solutions réparatrice et adaptative du climat. Elle doit le faire parce qu’elle est comme toutes les autres parties du globe, impactée par des événements rudes, dus au problème de dérèglement climatique. Faisant partie des continents identifiés comme vulnérables au dérèglement climatique, l’Afrique est particulièrement fragilisée. Or, nous semble-t-il, le continent africain est déjà très fragilisé par des événements extraclimatiques pérennes tels que la faim, la malnutrition, les guerres et, dit-on, des problèmes démographiques annoncés à l’horizon 2050.

Les problèmes du déficit démocratique, de la non-alternance au pouvoir et de la mal gouvernance sont déjà très impactants pour les populations africaines. Il serait de ce fait, prioritairement rationnel et judicieux pour les peuples africains, de hiérarchiser leurs priorités. Autrement dit, les peuples africains sont déjà victimes des difficultés extraclimatiques. Les phénomènes rares, identifiés comme étant liés au réchauffement climatique, peuvent donc être considérés comme anecdotiques et secondaires, compte tenu des difficultés préexistantes constatées dans cette partie du monde, en dépit des ressources naturelles dont dispose ce continent.

Malgré ces richesses reconnues, l’Afrique est encore considérée comme continent pauvre dans sa globalité. La pauvreté est ainsi identifiée comme principale cause de son retard en matière de développement multisectoriel. Les déficits démocratique et environnemental, les inégalités sociales, la non-redistribution des richesses et l’absence de transitions démocratiques, demeurent, entre autres causes, des préoccupations prioritaires, utiles au développement durable de ce continent.

Au vu de ce qui précède, il est possible pour ce continent, riche en ressources naturelles, de procéder, au préalable, à l’éducation et à la formation des populations dans les domaines clés et vitaux qui impactent leurs vies. Les secteurs cités supra en font partie, mais l’initiation de ses populations aux pratiques éco-environnementales semble un préalable, utile à la bonne compréhension de l’urgence climatique, à sa considération et à sa prise en compte. C’est dans ce sens qu’une prise de conscience de la surchauffe climatique est possible.

Car, il est difficile et peu réaliste d’expliquer à certaines catégories de personnes dépourvues de l’essentiel ; à savoir l’électricité, un logement décent ou l’eau potable, que les questions de la préservation de l’environnement ou du réchauffement climatique sont plus essentielles que les besoins vitaux qui précarisent déjà leur vie et leur sont préjudiciables.  Fort de cela, la formation et l’information a priori des populations sur ces problèmes cruciaux, dont l’importance de résoudre le problème de la surchauffe climatique, sont nécessaires. Sans doute, ces populations n’ont-elles échos que par les médias, eux-mêmes souvent peu ou mal formés aux problématiques environnementales et climatiques. Ainsi, une démarche pédagogique spécifique, qui tient compte des réalités sociétales, serait-elle plus à propos, afin d’assurer un travail de fond pour une meilleure prise de conscience de l’urgence climatique.

 

Par Blanchard MAKANGA


Biographie


Blanchard MAKANGA est diplômé de philosophie de l’Université de Poitiers. Chargé de Recherche à l’Institut de Recherche en Sciences Humaines (IRSH/CENAREST/Gabon), il est l’auteur de plusieurs ouvrages et articles sur les questions éthiques, environnementales, climatiques et technoscientifiques.

 

 

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