Cameroun : Les incohérences d’un décret présidentiel sur la décentralisation  

L’analyse du décret n°2021/743 du 28 décembre 2021, fixant la répartition de la Dotation Générale de la Décentralisation au titre de l’exercice 2021, qui informe que l’Etat a alloué 4,2%  de son budget pour la décentralisation révèle des multiples incongruités.

 

Le décret n°2021/742 du 28 décembre 2021 quant à lui…

 

 

Afrique54.net – De l’inédit dans l’histoire législative du Cameroun. Un décret sensé établir les modalités de dotation liées au processus de décentralisation, vient faire le bilan d’une activité de l’Etat. Ledit décret nous annonce que l’Etat a alloué au cours de l’exercice budgétaire 2021 ; 232, 1 milliards de francs CFA en faveur de la décentralisation.

Conformément aux prévisions de la loi de finance 2021, « le montant des ressources affectées à la Dotation Générale de la Décentralisation, au titre de l’exercice budgétaire 2021 est arrêté à la sommes de deux cent trente-deux milliards cent soixante-seize millions six cent vingt-quatre milles (232 176 624 000) francs CFA », indique le décret présidentiel.

Ce montant correspond à 4,2% du budget. Ce pourcentage est loin du quota annoncé par le gouvernement. En effet, dans l’optique d’accélérer le processus de décentralisation, le gouvernement camerounais avait annoncé la volonté d’affecter 15% de son budget.

35 milliards pour les régions

Cette enveloppe a été répartie en 125,7 milliards de dotation de fonctionnement et de 106,4 milliards de dotation d’investissement. Selon le décret, la plus jeune des collectivités territoriales décentralisées, à savoir la région, a reçu une dotation de 35 milliards de FCFA. 30 milliards de cette dotation étaient destinées à la mise place et au fonctionnement des régions et 5 milliards de francs CFA pour d’autres emplois. Les ressources destinées à la mise en place et au fonctionnement des régions ont été réparties de manière égalitaire soit 3 milliards par région.

En mai dernier, c’est après la vague d’organisation des premières sessions des Conseils régionaux en vue de l’adoption de la dotation de trois milliards de FCFA qui leur avait été alloué par l’Etat.

Un décret controversé

Faisant partie de la série des 5 décrets signés le 28 décembre 2021, le décret n°2021/743 fixant la répartition de la Dotation Générale de la Décentralisation au titre de l’exercice 2021 prête à controverse. Initialement focalisé sur les exécutifs régionaux, il vient faire le bilan du financement étatique en faveur de la décentralisation. A travers ce décret, il ressort que l’Etat camerounais a mis la charrue avant les bœufs. Comment expliquer qu’un décret qui devait être publié en décembre 2020 afin d’assurer le fonctionnement des exécutifs régionaux en 2021 est publié à la fin de cet exercice budgétaire.

Il cache entre autres des manœuvres de détournement au cours de la première année de gestion des régions. En effet, concernant les autres emplois dont l’enveloppe s’élève à 5 milliards de FCFA, l’article 7, demande aux « ordonnateurs et ordonnateurs délégués des organes et structures bénéficiaires des quotes-parts visées dans l’article 6 ci-dessus font tenir le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, le 31 janvier 2022 au plus tard un rapport d’activité assorti du compte d’emploi correspondant ».

Le décret n°2021/742 aussi en question

Selon un juriste ayant requis l’anonymat, « Pour mieux comprendre le sens de ces décrets, ça voudrait dire par exemple que le Centre et l’Extrême-Nord avec leurs populations en millions d’habitants auront les même dotations et les même nombres d’officiels que le Sud et l’Est ». « Pourquoi ne pas sortir une Note circulaire avec des grandes orientations, et laisser les responsables et élus régionaux s’organiser en fonction de leurs spécificités et de leurs besoins ? Vont-ils se sentir valorisés avec ce genre des instructions prescriptive qui leur tombent sur la tête, venant de Yaoundé ? » S’est-il interrogé avant d’ajouter : «  Ça donne l’impression que le régime veut une chose et son contraire ».

Ce décret controversé qu’on pourrait qualifier de bilanciel et au regard du pourcentage montre à suffire les entorses au parachèvement de la décentralisation au Cameroun.

Par ailleurs, un autre  décret portant l’organisation-type de l’administration régionale a suscité la réaction d’un expert en bonne gouvernance et en démocratie.  Pour lui l’article 11 qui stipule : « Une délibération du Conseil Régional ou de l’Assemblée régionale précise le mission de ces structures », fait problème.  Pour lui, « un décret présidentiel peut être modifié par les délibérations d’une structure inférieure ». Il pense qu’ « une Note Circulaire aurait été plus indiquée ».

 

By Afrique54.net – Erik Nganang

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