C’est vrai que la Chine n’a pas que des amis dans son voisinage. Les relations ne sont pas excellentes avec des pays comme le Vietnam, le Japon ou l’Inde pour diverses raisons : rivalités géopolitiques, vieilles rancunes…

Dans cette réponse, je vais éviter de parler de Taïwan car on sait déjà bien assez ce qui l’oppose à la RPC.

(Manifestation anti-chinoise aux Philippines[1], dans le contexte des tensions entre Pékin et Manille en mer de Chine méridionale.)

 

Conflit en mer de Chine méridionale

On peut citer évidemment les fameuses tensions entre de nombreux pays d’Asie du Sud-Est pour le contrôle de cette mer, sans doute la plus convoitée au monde.

Cette mer voit passer 1/3 du trafic maritime mondial, ce qui représente en moyenne 5 000 milliards d’euros chaque année. Ses réserves de pêche fournissent du travail et de la nourriture à des millions de personnes dans les pays riverains tout en représentant 10 % des prises mondiales.

Il y a donc de quoi susciter des convoitises. En tout, il y a 7 pays riverains qui revendiquent au moins une partie de cette mer : Brunei, la Chine, l’Indonésie, la Malaisie, les Philippines, Taïwan et le Vietnam.

Et le problème, c’est que les zones qu’ils revendiquent se croisent, ce qui créé évidemment pas mal de tensions. Chacun veut sa part du gâteau et se la dispute.

C’est la Chine qui revendique la plus grosse part puisque Pékin souhaite étendre sa souveraineté à quasiment l’ensemble de cette mer, au grand dam du Vietnam, des Philippines ou de la Malaisie.

Plusieurs pays concernés montrent les muscles dans la région, en intimidant les pêcheurs des autres nations et construisant des installations militaires sur des îles contestées, allant jusqu’à aménager des îles artificielles.

Par exemple, les Chinois ont installé des bases militaires sur plusieurs des îles Paracels et Spratleys, qui sont revendiquées aussi par Vietnamiens, Philippins et Malais.

(Des soldats chinois patrouillant sur l’île Woody, aux Paracels[2].)

Le Vietnam fait de même en déployant des troupes sur plusieurs des îles Spratleys[3]. D’ailleurs, toutes ces installations ont été faites en violation de la justice internationale. Et les Philippines ont rebaptisé une partie de la mer de Chine méridionale “mer des Philippines de l’Ouest”.

De plus, la compétition féroce entre pêcheurs chinois, vietnamiens ou philippins commence à épuiser les stocks de poissons, menaçant ainsi sérieusement l’équilibre écologique et la sécurité alimentaire de nombreuses personnes. Et tant que ces pays seront en conflit, ils ne pourront pas régler ce grave problème[4].

Les rancunes du passé

Au-delà de ces rivalités géopolitiques, il y a aussi un passé difficile, voire douloureux, entre ces pays et dont les plaies ne sont pas refermées.

En Chine (et pas que), il existe un certain ressentiment à l’égard du Japon pour les exactions commises par ce pays pendant la Seconde Guerre mondiale, comme le fameux massacre de Nankin ou les expériences médicales menées par l’unité 731 en Mandchourie.

Ce ressentiment est d’autant plus fort que le Japon tend généralement à atténuer, voire nier ces exactions, ce qui provoque des crispations, même l’indignation de la Chine mais aussi des Philippines, l’Indonésie, la Corée…

 

De son côté, le Vietnam se souvient de l’expédition punitive lancée contre lui par la Chine en 1979 pour avoir envahi le Cambodge afin de renverser les Khmers rouges soutenus par Pékin.

Aux 19e et 20e siècles, poussés par la croissance démographique et les difficultés économiques, beaucoup de Chinois et d’Indiens ont émigré dans les colonies européennes d’Asie du Sud-Est (et même d’Afrique) pour travailler dans l’agriculture, l’urbanisme ou l’administration.

En 1911, la Malaisie britannique comptait presque autant de travailleurs chinois et indiens que d’habitants malais. Ce qui a fini par créer un puissant sentiment nationaliste malais, non pas contre les Anglais mais contre les Chinois et les Indiens.

Aux Indes néerlandaises (l’actuelle Indonésie), de nombreux Chinois étaient employés dans l’administration coloniale. Ce qui a eu pour effet d’associer l’image du Chinois à celle du colonisateur aux yeux de la population, créant ainsi un ressentiment toujours présent en Indonésie.

Alliance Indo-Pacifique

Comme on le sait, la Chine et les USA sont en froid depuis quelques temps. Même si actuellement, on parle surtout de la Russie avec la crise ukrainienne, les USA n’oublieront probablement pas leur autre grand rival.

En Asie, les tensions s’illustrent par exemple par l’Indo-Pacifique[5], cette alliance formée par les USA regroupant le Japon, l’Inde, l’Australie… dont l’objectif est de contrer l’influence de la Chine qui cherche à s’étendre loin, notamment grâce la nouvelle route de la soie

(One Belt, One Road).

La Chine et le Japon se disputent les îles Senkaku pour leurs ressources de pêche et d’hydrocarbures, mais surtout pour leur position stratégique car le contrôle de cet archipel faciliterait beaucoup le contrôle de la mer de Chine orientale. C’est aussi pourquoi le Japon compte sur l’Indo-Pacifique.

(Altercations entre chalutiers chinois et garde-côtes japonais au large des îles Senkaku[6])

Pour les USA, la stratégie indo-pacifique consiste avant tout à se rapprocher de l’Inde. Ce pays est la clé de voûte de cette alliance en raison de son positionnement et de son potentiel.

La Chine et l’Inde connaissent des pics de tensions, comme à l’été 2020 lors des accrochages dans l’Himalaya qui ont fait des dizaines de morts, en raison du conflit frontalier qui oppose les deux pays depuis 1962.

Annoncé en grande pompe par Norendra Modi, un tir indien a été fait en 2019 pour montrer la capacité du pays à abattre des satellites en orbite[7]. Le message a été reçu cinq sur cinq à Pékin.

Autres sources

Cours de Licence 3 : Histoire des sociétés coloniales en Asie orientale (XIXe-XXe siècle), dispensé par Jean-François Klein, maître de conférences à l’Université Bretagne Sud

Gomart, T. Guerres invisibles : Nos prochains défis géopolitiques, Éditions Tallandier, 2021

Attali, J. Histoires de la mer, Édition Fayard, 2017

Notes de bas de page


Par Brian Gogarty, Étudiant en Histoire

Master d’Histoire de Université Bretagne Sud, Lorient2023 (attendu)
Facebook Comments Box